L’Association Nationale des Pêcheurs Haïtiens (ANPH) marque son anniversaire en dressant un bilan amer et en annonçant une nouvelle cellule de formation
Port-au-Prince le 10 décembre 2025 – À l’occasion de son 25ᵉ anniversaire, l’Association Nationale des Pêcheurs Haïtiens (ANPH) a lancé un appel solennel mêlant commémoration, dénonciation des abus et annonce le lancement d’une nouvelle initiative axée sur la formation. Dans un message adressé à toute la filière, le président de l’association, Mr. Marcéus Joseph Wilto, a souligné la portée symbolique de cette Journée Nationale des Pêcheurs, rappelé la mission fondatrice de l’organisation et mis en lumière les injustices qui continuent d’entraver le secteur.
Fondée le 10 décembre 2000 sous la présidence de René Préval, l’ANPH avait pour objectif de fédérer et structurer la pêche haïtienne, un pilier économique vital pour les communautés côtières réparties le long des 1 750 km de littoral du pays. La date, choisie en écho à l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948, traduisait une volonté d’inscrire ce secteur dans la dynamique des droits et de la dignité.
« L’ambition était de travailler main dans la main avec l’État et le secteur privé », rappelle l’association, qui affirme avoir été, dès ses débuts, mal perçue pour avoir « ouvert les yeux des pêcheurs sur les abus et la stigmatisation » qu’ils subissent.
UNE FILIÈRE MARGINALISÉE MALGRÉ SON IMPORTANCE ÉCONOMIQUE
Dans son communiqué, l’ANPH déplore une contradiction persistante : bien qu’elle génère des revenus significatifs, la pêche demeure un secteur marginalisé où les professionnels et leurs familles vivent souvent « dans une pauvreté incompatible avec les Objectifs de Développement Durable ».
« La pêche est un métier comme tous les autres », insiste l’association, réclamant reconnaissance, sécurité et respect.
Les accusations formulées sont précises et lourdes.L’ANPH mentionne des cas d’abus, de stigmatisation et d’insécurité sur plusieurs portions du littoral, évoquant pertes de matériel et violences perpétrées par des hommes armés. Elle cite notamment un incident récent chez « Piti », à Léogâne.
UNE MENACE CONTRE LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
L’affaire concernant M. Étienne, président de l’Association » Boukan Lotòre à l’île de la Gonâve « , illustre une dérive jugée préoccupante. L’ANPH dénonce la menace d’arrestation pour “diffamation et outrage” qui pèse sur lui, après des différends l’opposant au vice-délégué local.
« Nous disons non à ces pratiques contraires à la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui affirme dès son premier chapitre que chacun est libre d’exprimer ses opinions », souligne l’association. Un conflit local qui, selon elle, renvoie à un enjeu national de respect des droits fondamentaux.
UNE LUEUR D’ESPOIR : RENFORCER LES COMPÉTENCES PAR LA FORMATION
Dans un contexte difficile, l’ANPH annonce une initiative tournée vers l’avenir : la création d’une cellule de formation à distance, accessible via Google Meet dès 2026. Ce programme vise à renforcer les compétences techniques des travailleurs du secteur et à offrir un levier de professionnalisation à une communauté trop souvent laissée pour compte.
Alors que la protection de la vie sous-marine (ODD 14) est désormais un impératif global, l’association pose une question lourde de sens :
« Si les espèces marines doivent pouvoir vivre, qu’en est-il de nous, les êtres humains ? »
En ce 10 décembre 2025, l’ANPH ne célèbre pas seulement un anniversaire : elle porte un plaidoyer puissant pour les droits, la sécurité et la dignité de milliers de pêcheurs haïtiens.
Fritz Gerald Hussein VALME


