
Port-au-Prince, Haïti – Alors que la crise politique et sécuritaire s’aggrave en Haïti, le pays est devenu l’un des principaux hubs du trafic de cocaïne à destination des États-Unis. Selon des estimations, plus de 800 milliards de dollars de drogues transiteraient chaque année par l’île, principalement via Port-au-Prince, avant d’atteindre la Floride.
UN ÉTAT DÉFAILLANT, UN TRAFIC FLORISSANT
Avec un État en déliquescence et des institutions incapables d’assurer l’ordre, Haïti offre un terrain propice aux cartels. « Ils ont atteint leur objectif : faire d’Haïti l’un des plus grands points de passage de la drogue », déplore une source proche des enquêtes antidrogue.
Les preuves de cette emprise sont visibles : des trafiquants locaux affichent une richesse insolente. À titre d’exemple, un certain Izo posséderait un bateau d’une valeur de 600 000 dollars, une fortune dans un pays où plus de 60 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.
DES CHIFFRES VERTIGINEUX
La production colombienne de cocaïne en 2024 a atteint 2 000 tonnes, avec un prix moyen de 150 dollars le gramme. Environ 15 % de cette production transiterait par Haïti, générant des profits colossaux.
Si l’on estime que la « dime » (taxe illégale prélevée par les gangs et intermédiaires) s’élève à 4,5 milliards de dollars, cette manne financière ne semble pourtant aucunement réinjectée dans l’économie haïtienne. Contrairement à d’autres pays comme la République dominicaine ou les États-Unis, où l’argent du blanchiment influence visiblement l’immobilier et les secteurs formels, rien ne filtre en Haïti, si ce n’est… l’insécurité.
Un pragmatisme nécessaire face à un fléau incontrôlable
Face à cette situation, les experts appellent à une refonte totale de la stratégie étatique. « Il faut une autre vision, un pragmatisme certain », insiste un analyste. En l’absence d’un État fort, le pays reste à la merci des cartels, qui profitent du chaos pour asseoir leur domination.
Alors que la communauté internationale s’inquiète de l’instabilité chronique d’Haïti, la question du narcotrafic reste un angle mort des discussions. Pourtant, sans une lutte concertée contre ce fléau, toute tentative de stabilisation pourrait se révéler vaine.
Fritz Gerald Hussein VALME